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L’Etrange Festival 2012 : des documentaires pas banals
L’Etrange Festival ne se contente pas de proposer à ses spectateurs des films où l’hémoglobine coule à flots et dans lesquels les jumps scares se comptent à la pelle. Non, les programmateurs sont plus ambitieux que cela et ils ont raison : l’Etrange Festival, c’est aussi une section remarquée de documentaires en tout genre.
Si je n’ai hélas pas pu tous les voir, et notamment ceux fascinants de Ron Fricke (et notamment ce qui s’annonce comme la claque des mois à venir, Samsara, dont les retours furent plus qu’unanimes et enthousiastes), j’ai tout de même pu en découvrir trois sur des sujets très différents mais chacun passionnant sur le fond… Petite revue de détail.
- Blank City (de Céline Danhier)
La réalisatrice française fait revivre une époque révolue, celle qui a vu dans un New-York au bord de la faillite et tombant presque en ruine l’émergence d’un mouvement artistique majeure de la fin des années 70, la No Wave (en opposition ironique à la « Nouvelle Vague »), qui fut au cinéma ce que le punk fut à la musique. Cinéma de la transgression et de la liberté ayant comme figures de proue Amos Poe, Vivienne Dick et Richard Kern, la No Wave a notamment inspiré des réalisateurs comme John Waters. Céline Danhier replonge son spectateur au cœur de ces années-là via des images d’archives rares, de nombreux extraits de films qui donnent très envie de découvrir ses OFNIS ainsi que des interviews récentes des membres de ce mouvement qui reviennent sur leurs parcours et leur histoire. Même si assez télévisuelle dans sa forme (le montage sage enchaine à rythme régulier archives, extraits et interviews), Blank City reste fascinant sur le coin de voile qu’il lève sur un New-York méconnu, dangereux mais foisonnant.
- How to start your own country (de Jody Shapiro)
Comment ça, vous n’êtes jamais allĂ© en vacances en rĂ©publique de Molossia ou dans les principautĂ©s de SĂ©borga, Sealand et Hutt River ? Rassurez-vous, c’est logique puisque ces « pays » sont en rĂ©alitĂ© des micronations qui prĂ©tendent Ă un statut indĂ©pendant, qui parfois Ă©mettent leur propre passeport mais qui ne sont pas reconnus par aucune autre nation « officielle ». Au-delĂ de l’occasion de dresser un portrait loufoque de ces dirigeants d’opĂ©rette, le documentaire se pose aussi la question de ce que sont une nation et un pays. HĂ©las, Ă force de redondance (la question est posĂ©e Ă diffĂ©rents experts qui rĂ©pondent tous peu ou prou la mĂŞme chose) et d’une construction rĂ©pĂ©titive (chacune des 6 micronations est prĂ©sentĂ©e de la mĂŞme façon, seule l’histoire de Sealand, cette ancienne plate-forme pĂ©trolière en pleine Mer du Nord, sort du lot mais c’est aussi la plus connue), le documentaire finit par lasser. On aurait aussi rĂŞvĂ© de dĂ©couvrir d’autres formes d’utopies comme la communautĂ© auto-gĂ©rĂ©e de Christiania au Danemark. Le format aurait sans doute Ă©tĂ© plus adaptĂ© en dĂ©coupant le film en 6 mini-Ă©pisodes pour la tĂ©lĂ©vision. Mais pour les diplomates et dictateurs en herbe, ce petit guide de dĂ©marrage de son propre pays n’est pas dĂ©plaisant ni dĂ©nue d’humour.
- Room237 (de Rodney Ascher)
Déjà présenté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes au printemps, ce documentaire rassemble de façon presque exhaustive toutes les interprétations possibles et imaginables concernant Shining de Kubrick, réalisateur connu pour son obsession maladive du détail. Et c’est peu de dire que si certaines sont des plus convaincantes, d’autres sont plus surprenantes voire même carrément capilotractées. Le film parle d’ailleurs autant des significations cachées du film que des névroses des fans qui passent leur temps à se passer le film en boucle, à l’endroit mais aussi à l’envers, au ralenti, voire image par image. Ces obsédés de Shining font presque aussi peur que le pourtant déjà très inquiétant Jack Torrance… Mais, paradoxalement, on ressort de cette chambre 237 tout aussi perdu qu’en y rentrant sauf qu’avant on était simplement non-initiés et qu’après, on est juste déboussolés par cette avalanche de révélations mi-sérieuses mi-loufoques. Ce qui est certains par contre c’est que vous ne verrez plus jamais Shining de la même façon…. Redrum, redrum !
Emmanuel Pujol
ClassĂ© dans : Festivals · Mots-ClĂ©s: documentaire, Etrange Festival
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