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64eme festival de Cannes, où les films ne trouvent pas grâce à mes yeux!
Et la valse folle continue, ce tourbillon qui ne cesse jamais et dans lequel on se retrouve emporté presque malgré soi dans ce Festival où l’improbable côtoie le futile, où l’extraordinaire devient le quotidien…
Après une courte nuit, une de plus – c’est décidé, j’assume pleinement de vivre mon second Festival de Cannes pleinement et de ne plus stresser à l’idée de rater une ou deux projections -, je trouve la force de me lever assez tôt pour arriver au Palais pour la séance de 8h30 d’un film qui suscite une grande curiosité: The Artist.

Jean Dujardin et Bérénice Béjo dans The Artist
Un film muet en noir et blanc en 2011, forcément ça interpelle. Quand en plus Michel Hazanavicius, déjà responsable dans sa jeunesse du cultissime Le grand détournement, semble vouloir rendre hommage aux grands classiques de l’âge d’or hollywoodien, c’est avec une grande impatience que l’on attend le début de la projection. Et autant le dire tout de suite, contrairement à une grande majorité de la presse qui s’extasie devant ce film, j’ai été déçu par ce film finalement très grand public avec un Dujardin à la composition assez proche de celle d’OSS (sourire ultra-brite, mimiques rigolotes) et qui manque follement de créativité. Là où un film muet de Chaplin ou de Browning proposait dix idées visuelles à la seconde, The Artist recycle trois ou quatre propositions en boucle, allant même jusqu’à détourner son concept radical pour des gimmicks de mise en scène faciles (notamment dans un cauchemar où soudain le personnage principal « entend » des sons mais ne peut pas parler). Enfin et surtout, le scénario bien faiblard reprend sans le génie ni la malice celui de mon film culte, Chantons sous la Pluie. The Artist a en tout cas conquis son monde sur la Croisette qui semble donc bien en mal de bons films pour s’extasier devant ce qui ressemble pour moi à un produit bien calibré et un peu frelaté. Une vraie déception donc!
Pas le temps de se poser, il faut enchainer tout de suite avec le 2eme film en compétition de la journée, le nouveau film des Dardenne qui va lui aussi faire l’unanimité en sa faveur. Le gamin au vélo marque un tournant dans la carrière des frères belges pour trois raisons: la première, c’est qu’ils semblent avoir trouvé un certain optimisme et une relative légèreté avec ce scénario d’un petit garçon abandonné par son père et recueilli par une coiffeuse qui n’est que tendresse et patience, la seconde c’est qu’il semble avoir appris à se servir d’un pied – les cadres sont donc bien posés avec une belle lumière, bien loin de l’image tremblotante et brute de Rosetta. Enfin, ils confient pour la première fois un rôle principal à une actrice connue, Cécile de France (étonnamment juste et sobre), eux qui à chacun de leur film découvraient des comédiennes inconnues. J’ai tout de même trouvé que c’était un Dardenne assez mineur, içi point de radioscopie sociale austère mais une simple histoire assez lumineuse d’un petit garçon qui doit accepter de faire le deuil d’un père démissionnaire – l’aspect psychologique est assez bien traité jusqu’à un retournement dans le comportement du jeune héros un peu abrupt. Avec méchanceté, je serais presque tenté de dire que leur film ressemble à un téléfilm de prestige de France 3 même s’il faut bien admettre que le court film (1h27) se laisse agréablement suivre.
A peine le temps d’avaler un (mauvais) sandwich que je suis déjà au Debussy à 14h pour mon 3eme film de la journée, un thriller canadien remarqué à Sundance, Martha, Marcy, May, Marlene. Et je ne sais pas si c’est mon état de fatigue avancé (et ce n’est que le 4eme jour de Festival) ou la lenteur de ce drame psychologique qui m’a fait passer complètement à côté du propos. L’histoire de cette jeune femme qui se réfugie chez sa tante après avoir pendant été pendant plusieurs années sous la coupe sectaire d’un violeur violent m’a laissé complètement indifférent. Construit sous forme de flash backs comme d’autres films sur ce sujet d’une jeunesse en souffrance projetés à Cannes cette année, la mise en scène très formaliste et travaillée entrave l’empathie du spectateur pour l’héroïne pourtant malmenée de ce film rapidement oubliable.
Heureusement, j’allais terminer mon marathon cinématographique du jour avec un film assez inclassable et dérangeant, un film très attendu à la Semaine de la Critique (la salle était comme souvent prise d’assaut et comble), le 2nd film de Jeff Nichols après Shotgun Stories, Take Shelter. Toujours avec son acteur fétiche, l’excellent et trop rare Michael Shannon, le réalisateur offre avec Take Shelter un film rude et apocalyptique sur la schizophrénie. Où l’histoire de Curtis La Forche, un père de famille lambda, qui va être en proie à des cauchemars dérangeants et de plus en plus violents. Le plan final laisse planer le doute quant à la signification de l’ensemble et confirme Jeff Nichols comme un réalisateur à suivre dans le cinéma indé américain avec ce film qui n’est pas sans rappeler le Bug de William Friedkin.
Il était l’heure de penser aux réjouissances de la nuit cannoise. Suite à un léger malentendu, je n’allais pas encore ce soir découvrir la Villa Inrock (et donc rater le concert des Bewitched hands). Je finissais donc dans une pizzeria pour un repas sympathique avec des attachées de presse joyeusement saoules, une distributrice gaie et un jeune acteur à la cool – non je ne citerais pas de noms – avant de me diriger vers le 3-14, un club privé assez sélec (on y croise carrément Marc Dorcel – toute ma jeunesse) pour un show des déjantés Airnadettes, un groupe d’Air Concert (le concept? Un DJ qui mixe et 6 comédiens-showman sur scène qui miment sans instruments les attitudes de rockers barrés) qui ont complètement séduit le public. Je rentrais vers 3h du matin complètement sobre – pour une fois, l’alcool n’était pas gratuit au 3-14, les prix étaient même exorbitants, d’un Coca à 10€ à une bouteille de champagne à 400€, no comment, cela n’empêchait pas certains ultra-friqués de faire chauffer la carte bleue, magie cannoise ou pas! Encore 2h de boulot avant d’avoir le droit d’enfin m’écrouler dans les bras de Morphée. Je doute très fort de me lever pour la séance de 8h30, je crois juste avoir besoin d’une bonne excuse pour zapper le Malick. Réponse au prochain épisode…
Emmanuel Pujol
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