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Eden Log, 5 places de cinéma pour deux personnes à gagner
L’HISTOIRE
Un homme reprend conscience au fond d’une grotte.
Il n’a pas la moindre idée des raisons qui l’ont amené jusque-là , pas plus qu’il ne sait ce qui est arrivé à l’homme dont il découvre le cadavre à côté de lui.
Seule solution pour échapper à la créature qui le poursuit : remonter jusqu’à la surface à travers un réseau aux allures de cimetière et abandonné par une mystérieuse organisation, EDEN LOG.
LE PROJET « EDEN LOG »
Écho d’une écologie française en col roulé, traditionnellement moquée, les voix de Cassandre jusque-là entendues sont devenues écoutées. À l’heure où notre bien-être devient inversement proportionnel à celui de l’ensemble du reste du monde vivant, la société entière prend conscience d’un défi unique dans son histoire : sa propre croissance n’est plus soumise à l’enjeu de la simple sauvegarde de sa civilisation mais bien à moyen terme de celle de l’humanité tout entière.
C’est à cette question, qui nous dépasse tous et fantasmée par le genre, qu’aura à répondre TOLBIAC, modestement et pour le moins de façon radicale. À travers le vecteur du film fantastique, et de l’allégorie qu’il autorise, le voyage de TOLBIAC prend le sens d’une quête de lui-même et du rôle qu’il a à jouer dans ce monde obscur.
L’obsession de la mise en scène réside dans le fait de faire vivre le film à la hauteur de TOLBIAC. La caméra à l’épaule ajoutera à la volonté d’adhérer à sa vision, la simplicité du découpage à celle d’une continuité temporelle. Principe narratif évoquant celui d’un jeu vidéo, le personnage est projeté dans un monde dont il ignore tout. Les évènements et l’intuition sont les moteurs de ses choix. C’est au moment de son aboutissement que la mission est alors définie, c’est (hélas ?) après l’avoir remplie que le protagoniste prend totalement conscience du but de son périple. Jamais en retard ou en avance d’une information, le spectateur n’a d’autre alternative que d’appréhender ce qui l’entoure avec les sens de TOLBIAC, fussent-ils altérés.
Clairement à l’attention d’une catégorie de jeunes amateurs de l’horreur, mêlant visions mangas et codes de jeu de rôle, la volonté est d’entraîner le spectateur dans un monde parallèle par le biais d’une démarche quasi-classique à ses yeux. Profitant d’une culture générationnelle que j’ai pratiquée de façon intensive, j’ai l’ambition affichée de proposer à ce public ce qu’il recherche : un moment d’évasion dont il aura eu le sentiment d’avoir été plus que spectateur.
INTERVIEW DE FRANK VESTIEL (Réalisateur et Scénariste)
Comment êtes-vous devenu réalisateur?
Par le biais du storyboard qui m’a permis d’accéder au poste de second assistant réalisateur. J’ai vécu chaque tournage comme le dernier, comme si on allait m’annoncer la fin de la récréation. Parcours logique, je suis devenu premier assistant pour une série télé, «Central Nuit», réalisée par Didier Delaître, sur laquelle j’ai rencontré Clovis Cornillac, et j’ai enchaîné les films, à commencer par La Sirène rouge d’Olivier Megaton. J’ai mis du temps à me dédouaner de l’ambition de réaliser, pensant longtemps que c’était une affaire de gens brillants. J’ai réalisé quelques épisodes de «Central Nuit» mais le cahier des charges des chaînes – parfaitement justifié – m’a un peu pesé. Je suis retourné à l’assistanat. Clovis m’a alors suggéré de rencontrer Cédric Jimenez, un jeune gars un peu fêlé, et je me suis immédiatement senti au bon endroit, avec un producteur qui avait autant de choses à prouver que moi, qui était aussi affamé et impatient. On est partis bille en tête, et on a fabriqué EDEN LOG en un temps record. 10 mois à peine se sont écoulés entre notre rencontre et la livraison de la copie définitive du film.
Comment est né le projet?
Le film devait s’appeler Rezo Zero. L’anagramme et le chiffre avaient un sens qui ne fonctionnaient plus dans la version anglaise qu’il était important de tourner simultanément pour des raisons financières. EDEN LOG présentait l’avantage d’être cohérent dans toutes les langues. Le projet est né à partir d’une image très claire: une image quasi-muette en noir et blanc sur un oeil, une photographie qui se met en mouvement associée à la naissance littérale du héros. L’idée était de projeter le spectateur dans le film par le biais d’un personnage qui n’en sait pas plus que lui; j’imaginais un voyage à la découverte d’un monde à travers la subjectivité du protagoniste. J’ai tricoté le film à partir de là .
Parallèlement, dans une couche sous-jacente et plus personnelle, c’est la rencontre d’un homme qui ne sait rien avec le cinéma et ses composants : le découpage, le son, les projections, le montage, etc…
Que signifie le titre?
«Log» est un terme informatique, l’association des deux mots suggérant un Eden artificiel. Dans une recherche de fichier sur ordinateur, le log est la racine qui permet de remonter à ce que l’on a fait avant. Ca marche également comme métaphore de ce que ce personnage, qui ne sait plus qui il est ni ce qu’il faisait dans cet endroit, accomplit en remontant à la surface pour découvrir la vérité et son identité.
EDEN LOG est un film d’anticipation, mais peut être pas dans le sens classique du terme…
Il existe une spéculation dans l’anticipation: celle de vouloir imaginer à quoi ressemblera la technologie de demain. Pourquoi pas, mais la réponse coûte cher à l’image. Le fait est que le progrès prend très souvent des voies insoupçonnées. Les Pulps de science fiction des années 40 ou 50, qui représentaient l’âge d’or du genre, nous imaginaient conduire des voitures volantes en l’an 2000 et communiquer avec des téléphones qui faisaient la taille d’un avant bras. C’était ça, la vision du futur à l’époque. Ils n’avaient pas prévu qu’en 2000 on téléphonerait avec un objet de la taille d’un dé à coudre mais que l’on continuerait de rouler. J’appartiens à la dernière génération à avoir fantasmé l’an 2000. Je me demande souvent à quoi ressemblent les fantasmes des gamins du XXIème siècle. Cette spéculation technique est intéressante, mais elle est à mon sens à placer derrière les idées. Ce que permet l’anticipation, c’est de pouvoir repérer un grain de sable dans la société d’aujourd’hui et d’imaginer le cancer qu’il développera demain.
Ce grain de sable, dans EDEN LOG, c’est l’écologie…
Effectivement, il s’agit du rapport entre l’homme et la nature qui l’environne. Dans la nuit du 18 au 19 juin 2007 a eu lieu un événement mondial dont on a assez peu parlé: pour la première fois dans son histoire, l’humanité habite majoritairement les villes.
Aujourd’hui, l’homme se projette beaucoup plus dans un milieu urbain que rural, et c’est la première fois de toute son existence que ce basculement se produit. Le mouvement n’a aucune raison de s’arrêter, et certaines valeurs dans notre rapport à la nature vont forcément se perdre. Jusqu’ici, nous avons toujours eu un grand oncle ou un grand père qui possédait une maison à la campagne… Demain, la plupart des enfants n’auront plus de famille à la campagne, et passeront leur temps entre la station balnéaire bétonnée et la ville dans laquelle ils vivent. Pour la plupart des enfants des villes dont je fais partie, la nature se limite derrière des grilles définies, fermées à partir d’une certaine heure, les pelouses sont interdites, etc. La nature est presque perçue comme un simple objet décoratif. Cette perte de contact liée à la nature, même si le sujet est très à la mode actuellement, ne peut que s’amplifier. On ne vit plus avec la nature, on la traite comme un corps étranger qu’il faut protéger, préserver, mais auquel on ne s’intègre plus.
Quelles sont vos influences?
J’ai vu très peu de films étant gamin. Le cinéma n’était pas une activité familiale. Je me suis plongé dans la littérature d’aventure et la BD. La première chose que j’ai achetée dans ma vie était un comic Marvel. A l’adolescence, au milieu des années 80, j’allais à la bibliothèque municipale tous les mercredi après-midi dévorer les auteurs de «Métal Hurlant», comme Druillet, Bilal, dont on sous-estime encore l’influence … Si on m’avait demandé ce que voulais faire comme métier à l’époque, j’aurais répondu «Moebius». La série de L’Incal a été une révolution. Comme le Daredevil de Frank Miller, que je guettais chaque mois en librairie, Alan Moore et bien d’autres. Plus tard le manga est venu s’ajouter à la liste. C’est aussi le moment où on tentait d’inventer des jeux de société, ça a été une activité particulièrement formatrice dans la fabrication des scénarios futurs.
Et niveau cinéma?
L’arrivée du magnétoscope m’a permis de découvrir ces films que je n’avais pas le droit d’aller voir en salles. C’était la transgression de l’interdit qui nous fait découvrir les films de genre. Les premières oeuvres qui m’ont marqué sont donc Zombie, de George Romero, Class 84, de Mark Lester et bien sûr John Carpenter avec Assaut, New York 1997 ou Fog. Une révélation, au même titre que Dario Argento. Carpenter se réclamait beaucoup du cinéma classique, et je me suis mis à traquer tous les films qu’il citait. J’ai ensuite plongé dans l’expressionnisme allemand, dont la faculté à raconter des histoires sans paroles m’impressionnait énormément. L’imagination reste quand même un muscle, et je trouve toujours très enrichissant qu’un film le fasse travailler, qu’il vous pousse à deviner ce qui se passe en dehors de l’image. Ce principe de construction mentale fait tout l’intérêt de la littérature, et au niveau encore supérieur, celui de la musique, ces « films » qu’on se fabrique tous et dont on est le héros sont ceux qui finalement ne nous déçoivent jamais. Le cinéma peut sembler prémâché à côté.
EDEN LOG présente un futur très organique. Comment l’avez-vous bâti?
La déco du film a représenté un vrai challenge: il fallait créer un endroit abandonné qui ait vécu. Il n’y a rien de plus difficile. Je ne voulais surtout pas qu’EDEN LOG tombe dans le piège de ces films de science fiction qui font vivre les personnages dans des lieux hyper aseptisés qui ressemblent à des salles de bain. D’autre part, je ne voulais surtout pas que l’on puisse dater le film en identifiant des technologies. C’est pour cette raison que je ne filme aucun appareil, aucun cadran, aucun bouton. Comme je le disais, EDEN LOG ne prétend à aucun moment imaginer à quoi ressemblera la technologie de demain. Je n’en avais ni l’envie, ni les moyens.
Pourquoi Clovis Cornillac était-il le seul acteur qui pouvait jouer ce rôle?
Quand je tournais avec lui pour la télé, j’étais souvent fasciné par ses propositions de jeu permanentes, il m’en arrivait d’oublier mon propre travail d’assistant. On a partagé beaucoup de discussions sur l’envie de faire du cinéma, de se lancer là dedans, et c’est vraiment le premier à m’avoir encouragé. Au-delà de ça, parmi tous les comédiens que je connais, Clovis est celui dans lequel je me projette le plus facilement. Je m’identifie aisément à lui quand j’écris. Il a cette faculté de vous faire croire qu’il est une personnalité simple et abordable, que vous pouvez facilement détourer. Pourtant, même pour moi qui le connais un peu, il reste un mystère, beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. J’espère que cette ambivalence se retrouve dans le personnage.
Pour Clovis, il existe une différence très claire entre les amis avec qui il aime passer du temps et le boulot. Il ne mélange jamais les deux, ne fera pas un film pour vous faire plaisir. C’est très rassurant. Quand je lui ai donné le scénario d’EDEN LOG j’ai attendu son coup de fil d’après lecture comme n’importe quel réalisateur.
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